Daniel Bonvoisin : « Non, le jeu vidéo n’est pas néfaste en tant que tel »

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Dans la cadre de La Semaine Numérique consacrée en 2021 au « Bien-être numérique, question de dosage ? », Daniel Bonvoisin de Media Animation, spécialiste du gaming, redresse quelques stéréotypes liés au jeu vidéo.

Peut-on connaître le bien-être numérique même en étant un joueur assidu ?

La réponse est oui : on peut être un gamer impliqué tout en étant très bien dans ses baskets et c’est le cas de la plupart des joueurs. Comme toute activité de loisirs, elle prend la place qu’on lui donne et elle offre des opportunités qui vont bien au-delà du calcul du temps qu’on y passe.

Pourquoi a-t-on alors cette fausse impression que les joueurs assidus ont des problèmes relationnels ou subissent un mal-être ?

Cela vient d’une image sociale construite autour du joueur vidéo comme un ado isolé dans sa chambre, fixé sur son écran dans l’obscurité toute la journée alors que la pratique du jeu n’est pas une activité isolée ni même nécessairement une activité pratiquée à l’intérieur, je prends l’exemple du jeu Pokemon Go qui nécessitait de se promener. Résumer les jeux vidéos à un pur problème de temps qu’on y passe, c’est rater la richesse d’un média novateur et le réduire à son aspect le moins intéressant. C’est comme si vous résumiez l’intérêt d’un film à sa durée et le temps qu’on passe au cinéma pour le regarder. Est-ce qu’on juge la qualité d’un livre à son nombre de pages. La littérature a créé les mêmes inquiétudes au 19ème siècle : ne passait-on pas trop de temps à lire des romans et donc de la fantaisie ? Le jeu vidéo n’est que l’héritier malheureux d’une longue tradition de méfiance face aux médias qui semblent isoler leurs utilisateurs du reste du monde, or en l’occurrence une bonne partie de l’engouement autour des jeux vidéo vient précisément du fait qu’il se joue à plusieurs.

A partir de quand peut-on dire que la pratique du jeu vidéo devient problématique pour une famille ?

Je crois d’abord que la passion pour le jeu vidéo n’est pas la seule activité qui a un gros impact sur une vie familiale. Si vous avez un enfant passionné de foot, qui s’entraîne trois soirs par semaine et fait un match tous les dimanches immobilise toutes les ressources de la famille. Ce loisir n’a pas moins d’impact sur la vie familiale au fond qu’un passionné de jeu vidéo qui a du mal à venir à table. Il faut donc relativiser par rapport aux autres activités. Cela n’interdit pas aux parents d’aider leurs enfants à gérer leur temps de loisirs, leur investissement dans une activité au détriment de l’école ou de la famille. Le fait d’être devant un écran n’est pas plus problématique qu’une autre activité qui serait aussi absorbante.

J’ai entendu ce conseil adressé à des parents de jouer avec leurs enfants au jeu vidéo ; qu’en pensez-vous ?

Oui, parce que la pratique des jeux vidéo est différente d’un jeu à l’autre. Entre quelqu’un qui crée des univers sur Minecraft et quelqu’un qui joue à des jeux de rôle pendant des heures, ou donner rendez-vous à des amis pour coordonner une action bien précise dans un jeu de gestion, il y a des mondes de différence. Cela permet donc aux proches de se rendre compte de comprendre quel sens a le jeu pour le joueur.

« Le jeu vidéo et le bien-être numérique » : conférence de Daniel Bonvoisin